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Les deux premiers producteurs mondiaux de cacao ont mis en place un nouveau mécanisme de fixation des prix des fèves afin de promouvoir la durabilité de leurs secteurs respectifs et de garantir des revenus plus élevés pour les producteurs.
Le 6 août, le président ivoirien Alassane Ouattara a annoncé que son pays et le Ghana allaient introduire un prix minimum d’achat pour les fèves de cacao, fixé à 2600 dollars la tonne, et ce à compter de la saison 2020/2021.
Cette initiative, qui fait également passer le prix garanti pour les producteurs de 750 francs CFA($1,28) le kilo à 1000 francs CFA ($1,70) à partir du mois d’octobre, est destinée à protéger les moyens de subsistance des producteurs dans les deux pays, en réponse aux déséquilibres perçus entre les revenus des producteurs et les profits réalisés par les gros négociants.
« Nous sommes parvenus à un consensus ; tout le monde s’accorde à dire que les producteurs ne sont pas rémunérés correctement et qu’il faut faire quelque chose pour améliorer [leurs] conditions», a déclaré mi-juin Yves Brahima Koné, directeur général du Conseil du Café-Cacao ivoirien.
Le programme vise à protéger les planteurs des fluctuations négatives du prix des fèves de cacao, comme ce fut le cas entre décembre 2015 et décembre 2017, où les prix ont chuté de 74,5% en raison d’une offre excédentaire.
Les commentaires du président Ouattara signent un retour à des propositions antérieures destinées à doper les recettes de la filière cacao, constituant un changement de cap par rapport aux mesures négociées le mois dernier.
La Côte d’Ivoire et le Ghana s’étaient mises d’accord sur la mise en place d’un prix minimum d’achat de 2600 dollars la tonne au mois de juin, mais suite à des négociations avec des représentants de la filière chocolat en juillet, les représentants du gouvernement ont remplacé la proposition initiale par l’instauration d’un « différentiel de revenu de subsistance » fixé à 400 dollars la tonne qui sera intégré aux contrats d’exportation.
Ce mécanisme prévoyait que les acheteurs paient 400 dollars supplémentaires la tonne de cacao lorsque la tonne se négocierait à moins de 2600 dollars sur les marchés et que les producteurs recevraient 70% du prix total.
Ce programme stipulait également que dans le cas où les prix du marché dépassaient le seuil de 3000 dollars la tonne, les ressources seraient versées sur un fonds de stabilisation qui pourrait être utilisé ultérieurement afin d’étoffer les revenus des producteurs durant les périodes de prix bas. Le montant exact des sommes qui seraient versées sur le fonds de stabilisation n’était toutefois pas connu au moment de la rédaction.
Une « OPEP du cacao » ?
L’intervention marque la volonté des deux pays d’affirmer leur influence sur les marchés mondiaux du cacao.
Si les deux pays sont à l’origine de 65% de la production mondiale de cacao – 45% en provenance de Côte d’Ivoire et 20% en provenance du Ghana -, ces derniers n’en retirent que 6 milliards de dollars par an sur les 100 milliards de dollars que représente le marché mondial du cacao.
S’inspirant des efforts déployés par l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP), afin de faire pression sur l’offre et sur les prix des hydrocarbures, Mahamudi Bawumia, le vice-président du Ghana, a exprimé son enthousiasme quant à la création d’une alliance des pays producteurs de cacao baptisée COPEC.
Si l’initiative d’imposer un prix minimum parvenait à stabiliser les revenus des producteurs, les répercussions dans les deux pays pourraient être bien plus vastes étant donné la place de choix du secteur dans les économies ivoirienne et ghanéenne : le cacao constitue 40% des recettes d’exportations en Côte d’Ivoire et emploie quelque 2 millions de petits producteurs, tandis que le Ghana doit au secteur 25% de ses recettes d’exportation.
Un marché plus stable améliorerait la subsistance des millions de personnes qui travaillent dans le secteur. L’accès au crédit serait également facilité pour les planteurs, ce qui pourrait entraîner une hausse de la production et contribuer à soutenir la politique gouvernementale visant à accroître la transformation locale du produit.
Désireuse de capter une part plus importante des recettes du secteur du cacao, la Côte d’Ivoire vise à transformer sur son territoire d’ici l’an prochain la moitié de sa production de cacao, contre 30% en milieu d’année 2016.
Même chose pour le Ghana, qui entend également transformer lui-même la moitié de son cacao dans un futur proche, contre 20% environ actuellement.
Inquiétudes quant à la mise en œuvre et aux effets sur les marchés
Malgré les retombées positives que devrait susciter l’initiative, des inquiétudes se sont fait entendre quant à la mise en œuvre de ces mesures.
Si les représentants des entreprises chocolatières soutiennent explicitement une augmentation des revenus des producteurs, ils ont émis des réserves quant à toute tentative d’influencer les prix du marché, confiant aux médias internationaux leurs craintes que de telles propositions fassent courir des risques considérables aux entreprises dans le cas d’une chute des cours des matières premières.
Un prix minimum pourrait également avoir des répercussions sur les marchés mondiaux du cacao. Selon certains analystes spécialisés dans les matières premières, l’introduction d’un prix plancher de 2600 dollars, qui se situe environ 8% au-dessus des prix actuels du marché qui s’élèvent à 2400 dollars, ou l’introduction d’un différentiel de 400 dollars, pourraient faire fuir certaines entreprises de transformation du cacao qui se tourneraient vers d’autres marchés pour s’approvisionner en matières premières sur le long terme. Un scénario qui pourrait entraîner un excédent de cacao en Afrique de l’Ouest.
En outre, si le différentiel de revenu de subsistance semblait représenter un compromis pour les acteurs privés et publics, la promesse du président Ouattara de revenir au prix minimum de 2600 dollars la tonne de cacao pourrait être accueillie moins favorablement.
A cet effet, des représentants des gouvernements ivoirien et ghanéen devraient se réunir mi-septembre avec des personnalités clés du secteur du chocolat afin de s’entretenir des aspects techniques de l’accord.
How Côte d’Ivoire and Ghana’s minimum pricing proposal could impact the cocoa industry
En Français
The world’s two largest cocoa-producing nations are seeking to promote sustainability in their respective industries, as well as ensure higher earnings for farmers, by agreeing to a new pricing mechanism for the sale of cocoa beans.
On August 6 Côte d’Ivoire’s President Alassane Ouattara announced that his country and Ghana would introduce a $2600-per-tonne minimum price on cocoa bean sales, to be implemented on purchases from the 2020/21 season onwards.
The initiative, which also raises the guaranteed price for farmers from CFA750 ($1.28) per kg to CFA1000 ($1.70) as of October, is designed to protect the livelihoods of farmers in both countries, and responds to perceived imbalances between growers’ incomes and the profits of large commodity traders.
“We arrived at a consensus; everyone agrees that the producers are not well compensated, and that something must be done to improve [their] conditions,” Yves Brahima Koné, general manager of Côte d’Ivoire’s Coffee and Cocoa Council, said in mid-June.
The plan aims to protect growers from negative fluctuations in the price of cocoa beans, as when prices fell 74.5% from December 2015 to December 2017, due to excess supply.
President Ouattara’s comments mark a return to earlier proposals aimed at boosting cocoa returns and represent a change of course from plans negotiated last month.
Côte d’Ivoire and Ghana had initially agreed to implement the flat $2600-per-tonne minimum price in June, but talks with chocolate industry representatives in July led officials to replace the proposal with a $400-per-tonne “living income differential” that would be written into export contracts.
Under this system, buyers would have paid an additional $400 per tonne on cocoa purchases when market prices dipped below $2600, and farmers would receive 70% of the overall price.
The plan also stipulated that should market prices exceed $3000 per tonne, resources be directed towards a stabilisation fund, which could later be tapped to bolster farmers’ incomes during times of low market prices. However, precisely how much would be directed towards the fund was not clear at the time of writing.
An ‘OPEC for cocoa’?
The intervention signals a move by both nations to assert their influence on global cocoa markets.
Despite producing around 65% of the world’s cocoa – 45% comes from Côte d’Ivoire and 20% from Ghana – the countries receive only about $6bn each year from the $100bn global chocolate industry.
In a nod to efforts by the Organisation of the Petroleum Exporting Countries (OPEC) to exert pressure over the supply and price of hydrocarbons, Mahamudu Bawumia, the vice-president of Ghana, expressed enthusiasm about creating an alliance for cocoa-producing countries called COPEC.
If successful in stabilising income for farmers, the minimum price initiative could have widespread effects in both countries given the industry’s economic significance: cocoa makes up 40% of Ivorian export revenue and supports some 2m small-scale farmers, while in Ghana cocoa accounts for around 25% of export revenue.
A more stable market would improve the livelihoods of the millions who work in the industry. It would also increase farmers’ chances of gaining access to credit, which in turn could help boost production and support government efforts to increase local processing.
In order to capture a greater share of cocoa industry revenue, Côte d’Ivoire aims to locally process as much as half of its cocoa output by next year, up from 30% in mid-2016.
Ghana likewise aims to process half of its yield in the near future, compared to current levels of around 20%.
Concerns over implementation, market impacts
Despite the projected benefits of the initiative, concerns have been expressed regarding implementation of the measures.
Although they nominally support increasing farmers’ returns, representatives from chocolate companies have voiced disquiet about any attempt to influence market prices, telling international media that they fear such proposals could place significant risk on companies should commodity prices fall.
A minimum price could also impact global cocoa markets. Some commodity analysts have warned that the introduction of the $2600 floor price, which is around 8% above current market prices of $2400, or the introduction of the $400 differential could see some processors turn to other markets for their cocoa supplies in the long term. This could potentially trigger a surplus of cocoa in West Africa.
Furthermore, while the living income differential appeared to offer a compromise between public and private players, President Ouattara’s pledge to revert to the $2600 minimum rate could see a colder reception.
To this end, Ivorian and Ghanaian government representatives are expected to meet with key chocolate industry figures in mid-September to discuss technical aspects of the deal.