In English
Améliorer son système de santé constitue l’un des éléments centraux de la stratégie ivoirienne visant à faire du pays un marché émergent d’ici 2020 ; à cet effet, le gouvernement s’attèle à mettre en place un cadre organisationnel pour le lancement d’une avancée sanitaire attendue de longue date, la couverture maladie universelle (CMU).
Suite à l’adoption en mars du projet de loi instituant la Couverture Maladie Universelle, le gouvernement prévoit d’instaurer la couverture universelle par étapes, à commencer par le lancement des activités du Fonds National de l’Assurance Maladie, chargé de la gestion du système, le 1er janvier 2015.
Le gouvernement procèdera à une mise en place progressive du dispositif, étalée sur la période 2015-2019. Le FMI indiquait au mois de juin que 17% de la population pourrait profiter de la couverture universelle au cours de sa première année d’existence, un pourcentage qui passerait à 40% d’ici 2020.
Financer la CMU
S’exprimant dans le cadre d’un séminaire en février dernier, la Ministre de la Santé, Raymonde Goudou Coffie, a expliqué que près de 95% des Ivoiriens ne disposaient pas d’assurance maladie. « Cette couverture universelle constitue une réponse à la réduction de la pauvreté en permettant l’accessibilité de tous à des soins de qualité et abordables, » a-t-elle déclaré.
Le FMI a salué l’initiative, mettant en avant les bénéfices tangibles que celle-ci ne manquerait pas d’apporter à la population. Il a toutefois fait observer que des risques budgétaires pourraient résulter « d’une augmentation plus forte que prévu de la consommation moyenne des services de santé et de la demande d’installations et de services publics de santé, ainsi que d’un ciblage insuffisant des ménages aidés. »
Le système prévoit que tous les Ivoiriens puissent prétendre à une offre minimale de prestations de santé pour une cotisation mensuelle de 1000 francs CFA (1,50 euro). L’Etat s’engage également au financement d’un fonds spécial doté de 49 milliards de francs CFA (74,7 millions d’euros) qui permettra de prendre en charge en partie ou totalement les cotisations des Ivoiriens ne disposant pas de ressources suffisantes. D’après les estimations du FMI, cette subvention pourrait représenter un coût annuel équivalent à 0,2% du PIB selon l’étendue de la couverture.
Le FMI estime le lancement du projet à environ 15 milliards de francs CFA (22,9 millions d’euros) cette année, somme à laquelle s’ajoute une loi budgétaire qui couvre des coûts administratifs de 5 milliards de francs CFA (7,6 millions d’euros) ainsi que l’identification et l’inscription de participants financées par des bailleurs de fonds, pour un coût de 10 milliards de francs CFA (15,28 millions d’euros). Une fois le programme sur les rails, les cotisations mensuelles constitueront la principale source de financement du dispositif.
Des détails à préciser
À l’annonce de la création du Fonds National de l’Assurance Maladie, le Ministre de l’Emploi, des Affaires Sociales et de la Formation Professionnelle, Moussa Dosso, a souligné que 13 études techniques avaient été réalisées quant à la faisabilité de la CMU. Le système, qui prévoit une cotisation minimale de la part de tous les Ivoiriens à partir de l’âge de 5 ans, sera contributif et permettra l’accès aux soins dans des établissements publics et privés de telle sorte que les Ivoiriens seront libres du choix de leur médecin généraliste.
La mise en place du dispositif devrait entrainer une hausse considérable des activités du secteur de la santé, et le secteur privé peut s’attendre à voir son nombre de patients augmenter. Les prestataires de services de santé tiennent toutefois à s’assurer que le marché reste libéralisé. « L’Etat peut aider à lancer la machine, mais ne devrait pas être impliqué sur le long terme, ce ne serait pas viable, » a déclaré à OBG Oumar Kébé, Directeur Général pour l’Afrique de l’Ouest de GlaxoSmithKline.
Il reste encore à déterminer un aspect important, à savoir quelles prestations seront prises en charge par la CMU, à chaque niveau du système. Le Ministère de la Santé a travaillé en étroite collaboration avec le Ministère de l’Emploi et l’Organisation Mondiale de la Santé à ce sujet -notamment lors d’un séminaire conjoint organisé en février dernier à Grand Bassam – mais pour l’heure aucune annonce officielle n’a été faite quant à la composition exacte du « panier de soins ».
Un pays qui reste en convalescence
L’amélioration du système de santé et la consolidation des indicateurs revêtent une importance cruciale pour la Côte d’Ivoire. Si le pays a été épargné par l’épidémie d’Ebola – qui touche des pays africains tels que le Libéria, la Sierra Leone et la Guinée – d’autres maladies infectieuses, comme le paludisme et le VIH/Sida, ont eu un impact sur la population. Selon l’UNICEF, le paludisme serait la première cause de consultation et d’hospitalisation dans le pays et 3,5 millions d’enfants de moins de 5 ans y seraient exposés. Le VIH/Sida, dont le taux de prévalence est estimé à 4,7%, constitue la première cause de décès chez les hommes et la deuxième chez les femmes après les complications liées à la grossesse et à l’accouchement, faisant de la Côte d’Ivoire le pays le plus touché d’Afrique de l’Ouest.
En outre, la Côte d’Ivoire peine à se relever des conséquences de la « décennie perdue » placée sous le signe du conflit. La mission de l’ONU en Côte d’Ivoire avance que la crise a ébranlé le système de santé, en particulier dans les régions du centre, du nord et de l’ouest. À l’époque, entre 50% et 75% des travailleurs de santé qualifiés ont quitté leur poste et de nombreux établissements de soins ont fermé leurs portes. Le déficit en infrastructures et en ressources humaines ainsi créé continue de limiter les capacités.
Si la Côte d’Ivoire a augmenté ses dépenses de santé - celles-ci atteignaient, selon les derniers chiffres publiés par la Banque Mondiale, 7,1% du PIB en 2012 – le pays reste très en deçà de son objectif de consacrer 15% du PIB au secteur, conformément à la Déclaration d’Abuja, signée par 54 pays membres de l’Union Africaine en 2001. En mettant en place un système de couverture maladie universelle qui soit budgétairement viable, le pays pourrait augmenter considérablement les dépenses nationales en matière de santé, entrainant un développement du secteur privé qui, à son tour, contribuera à alléger les pressions exercées sur les ressources publiques.
Côte d’Ivoire set to roll out universal health cover
In French
With improved health care a key aspect of Côte d’Ivoire’s strategic plan to become an emerging market by 2020, the government is putting in place an organisational framework to launch the long-awaited universal health scheme (Couverture maladie universelle, CMU).
Following the adoption of the Universal Health Care Law in March, the government will roll out universal coverage in stages, beginning on January 1, 2015 with the start of operations for the National Health Insurance Fund, which is tasked with managing the system.
The government will progressively implement the scheme over the period 2015–2019. The IMF noted in June that 17% of the population is likely to be covered in the first year of operation, with this proportion rising to 40% by 2020.
Funding the CMU
Speaking at a February seminar, the minister of health, Raymonde Goudou Coffie, said about 95% of the Ivoirian population has no health insurance. “The Universal Health Fund will give all Ivoirians access to affordable, quality health care. In this sense, it will contribute to reducing poverty,” she said.
The IMF lauded the initiative, saying it would provide tangible benefits for the population. However, it noted that fiscal risks may arise from “a higher-than-projected increase in the average consumption of health services and in the demand for public health care facilities and services, as well as insufficient targeting of subsidised households.”
Under the scheme, all Ivoirians will be entitled to a minimum health package for a monthly contribution of CFA1000 (€1.50). There will also be a special CFA49bn (€74.7m) state-financed fund to partially or wholly alleviate the costs for those who cannot afford the contribution. The IMF estimates that this subsidy could amount to an annual cost of 0.2% of GDP depending on the scale of the coverage.
According to the IMF, launching the project will cost around CFA15bn (€22.9m) this year, with the supplementary budget law covering administrative costs of CFA5bn (€7.6m) and the identification and enrolment of participants financed by donors at a cost of CFA10bn (€15.28m). Once the programme is up and running, monthly contributions will be the main financing resource of the scheme.
Details to be ironed out
At the announcement of the establishment of the National Health Fund, the minister of employment, social affairs and professional training, Moussa Dosso, said 13 technical studies had been conducted on the feasibility of the scheme. The system, based on Ivoirians making a minimum contribution from the age of five, would be pay-as-you-go and give access to care in both public and private facilities so that people will be free to choose their general practitioner.
The scheme should significantly boost activity in the health care segments, with the private sector likely to see an increase in patients as a result. However, health care providers are keen to ensure that the market remains liberalised. “The state can help jump-start the process, but should not be involved in the long run, otherwise it will be unsustainable,” Oumar Kébé, general manager for West Africa, GlaxoSmithKline told OBG.
An important aspect that still needs to be clarified is what care will be covered by the CMU, at each level of the system. The Ministry of Health has been working together with the Ministry of Employment and the World Health Organisation on this question – notably during a joint seminar organised in February in Grand Bassam – but no official announcement has yet been made as to the exact composition of the “healthcare basket”.
Still in recovery
Improving its health care system and boosting indicators is crucial for Côte d’Ivoire. While the country has been spared by the Ebola epidemic − affecting West African countries such as Liberia, Sierra Leone and Guinea − other infectious diseases, including malaria and HIV/AIDS, have had an impact on the population. According to UNICEF, malaria is the leading cause for consultation and hospitalisation with about 3.5m children under five exposed to it. HIV/AIDS, with a national prevalence rate estimated at 4.7%, is the first cause of death for men and the second for women after problems during pregnancy and childbirth in Côte d’Ivoire, the most affected country of West Africa.
Côte d’Ivoire is also still struggling to recover from the consequences of the “lost decade” of conflict. According to the UN mission in Côte d’Ivoire, the crisis disrupted the health system in the central, northern and western regions in particular. At the time, between 50% and 75% of trained health workers left their work, while many care facilities closed down. The subsequent infrastructural and staffing deficit continues to limit capacity.
Although it has increased spending on health − which amounted to 7.1% of GDP in 2012, according to the latest figures compiled by the World Bank − Côte d’Ivoire still lags far behind its objective of allocating 15% of GDP to the sector, as stated in the 2001 Abuja Declaration signed by 54 member states of the African Union. By rolling out universal coverage in a fiscally-sustainable manner, it has the potential to significantly increase domestic spending on health care and, as the private sector grows in response, it will help alleviate pressure on public resources.