Côte d’Ivoire : Relance des cultures marchandes

In English

La filière ivoirienne du cacao a amorcé un tournant au cours de la première semaine d'octobre. En effet, à compter de la saison en cours, le gouvernement a décidé de fixer le prix de vente de cacao dans le cadre des efforts déployés pour promouvoir les cultures marchandes du pays.

Le gouvernement a donné le coup d'envoi de la saison du cacao en annonçant à tous les producteurs qu'un prix de 725 francs CFA (1.11 euro) le kg, équivalant à 60 % du tarif international, leur serait garanti. Cette réforme a essentiellement été mise en œuvre afin de satisfaire aux conditions du Fonds monétaire international (FMI). Pour bénéficier d'un allègement de quelque 3 milliards de dollars de sa dette, au titre de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, le gouvernement ivoirien a accepté de mettre en place une réglementation plus stricte dans la filière du cacao.

Le FMI estime que ces mesures, notamment l'établissement du prix du cacao, se traduiront par une plus grande stabilité économique dans le pays. Par ailleurs, selon les défenseurs de la réglementation, au vu de la position dominante de la Côte d'Ivoire sur le marché international du cacao, l'établissement d'un prix fixe à l'échelle nationale permettra également au pays d'influer de façon significative sur le cours mondial du cacao.

La Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial de cacao ; elle fournit environ 40 % de la production globale (soit près de 1.5 million de tonnes de fèves par an), et compte environ 1 million de producteurs. La moindre fluctuation du prix de cette denrée est ressentie quasi instantanément, et ces flottements sont assez courants. En novembre 2011, le prix du cacao a progressé pour s'établir à 2 175 euros la tonne ; il a ensuite fortement chuté à la fin de l'année, avant de repartir lentement à la hausse en août 2012.

Le gouvernement avait déjà tenté, dans le passé, de recourir à des prix indicatifs pour limiter la volatilité des prix dans le secteur, cependant cette mesure s'était avérée inefficace. Lors de la saison agricole 2010-11, le prix indicatif du cacao était de 1 100 francs CFA (1.68 euro) le kg, pourtant, le prix réel pratiqué n'était souvent que d'à peine plus de la moitié de celui-ci, soit environ 600 francs CFA (0.91 euro) le kg, voire moins.

Si le prix de 725 francs CFA (1.11 euro) le kg est inférieur au prix indicatif de 2011, les décideurs estiment néanmoins que la stabilité obtenue grâce au prix garanti fait de cette mesure un compromis judicieux pour les producteurs. Par ailleurs, en vertu de la nouvelle réglementation, il est désormais illégal de commercialiser le cacao à un prix autre que le prix établi ; les contrevenants seront passibles d'une peine de prison, et se verront priver de leurs droits de produire et d’exporter le cacao.

Ces mesures ont été adoptées pour lutter contre la contrebande à laquelle se livrent les agriculteurs locaux qui tentent de vendre leur récolte dans les pays voisins à des prix plus élevés. Au Cameroun par exemple, le prix de vente des fèves de cacao avoisine les 1 200-1 500 francs CFA (1.83-2.29 euros) le kg.

Pour garantir le respect du prix établi, et éviter toute fraude fiscale, le gouvernement a mis en place un système de reçus de vente, qui peut également être utilisé pour détecter les ventes illégales.

Bien que les producteurs de cacao soient généralement favorables à la réforme de l'agriculture, certains estiment n'avoir pas eu voix au chapitre dans le dialogue sur l'établissement du prix, et considèrent que davantage d'agriculteurs auraient dû être directement impliqués dans le processus de délibération.

Outre les réformes de la filière du cacao, le gouvernement a récemment lancé le Programme national d'investissement agricole (PNIA), qui vise à assurer une plus grande sécurité alimentaire dans le pays, tout en appuyant les exploitants dans l'optique de renforcer la diversité des cultures marchandes.

D'autres cultures marchandes semblent particulièrement profitables, notamment la culture du caoutchouc qui attire l'attention et les investissements du gouvernement. D'après un rapport du Pulitzer Center, le caoutchouc est sans doute la principale menace pour le développement continu de la filière du cacao ; si son prix de vente diffère relativement peu de celui du cacao, la période de culture est cependant plus longue (10 mois contre 6 pour le cacao), et les arbres sont plus productifs, ce qui offre davantage d'opportunités de revenus aux producteurs.

La Côte d’Ivoire est également un grand exportateur de noix de cajou et en produit quelques 400 000 tonnes chaque année, qui sont exportées essentiellement en l'état. L'Autorité de régulation du coton et de l'anacarde (ARECA) s'efforce néanmoins de changer cela et œuvre pour la multiplication des infrastructures de traitement, avec pour objectif ultime de traiter environ la moitié de la production totale.

S'il peut être judicieux, à l'avenir, d'impliquer davantage les producteurs agricoles dans l'élaboration du cadre de réforme, les efforts déployés par la Côte d’Ivoire pour dynamiser la production locale de certaines cultures, et préserver la stabilité des prix pour d'autres, du moins pour l'instant, vont dans la bonne direction..

 

Côte d’Ivoire: Boosting cash crops

En Français

Côte d’Ivoire’s cocoa-growing season was off to a fresh start in the first week of October. Beginning this growing season, the government has set a fixed price for cocoa sales, in addition to establishing other efforts aimed at promoting the country’s cash crops.

The national government kicked off the cocoa-growing season by announcing that all producers would receive a guaranteed price of CFA725 (€1.11) per kg, which is 60% of the international price. This reform was implemented largely due to IMF stipulations. In return for providing the country with some $3bn in loan forgiveness as part of the Heavily Indebted Poor Countries Initiative, Côte d’Ivoire’s government agreed to implement stricter regulation of the cocoa segment.

The IMF believes that measures such as fixing the price of cocoa will provide a greater degree of economic stability for the country. Proponents of the regulation also argue that, given Côte d’Ivoire’s domination of the international cocoa market, setting a fixed price nationally may also allow the country to significantly influence the global price of cocoa.

Côte d’Ivoire is the world’s leading cocoa producer, accounting for approximately 40% of global output, or around 1.5m tonnes of beans per year, and is home to around 1m cocoa producers. Any fluctuation in the commodity’s price is felt almost immediately, and fluctuations are quite common. In November 2011 cocoa prices rose to €2175 per tonne, followed by a sharp drop at the end of the year, and then slowly regained strength in August 2012.

While the government had previously attempted to use indicative prices to establish greater price stability in the sector, this was largely ineffective. In the 2010-11 growing season, the indicative price for cocoa was CFA1100 (€1.68) per kg. In practice, however, cocoa was regularly purchased for a little more than half this price, at around CFA600 (€0.91) per kg, and sometimes even less.

While CFA725 (€1.11) per kg is a reduction from the indicative price in 2011, lawmakers argue that the ensured stability of a guaranteed price makes it a worthwhile trade-off for producers. The new regulation also stipulates that selling cocoa for any other price is considered illegal and punishable with prison time, in addition to having cocoa production and exportation rights revoked.

These measures were put in place to counteract contraband activities, perpetrated by local farmers attempting to sell their produce in nearby countries at higher prices. In Cameroon, for example, cocoa beans sell for around CFA1200-1500 (€1.83-2.29) per kg.

To ensure that the fixed price is enforced and the country does not miss out on tax revenue, the government has designed a sales receipt system that can purportedly be used to identify illegal sales.

While cocoa producers are generally supportive of the agricultural reform, some feel that their opinions were neglected in the price-setting dialogue and that more farmers should have been directly involved in the deliberation process.

In addition to cocoa reforms, the government recently launched the National Agricultural Investment Programme (PNIA). The PNIA is a programme aimed at promoting greater food security in the country, as well as supporting commercial farmers in efforts to develop more diverse cash crops.

Other cash crops appear to be performing well, with rubber in particular garnering attention and investment from the government. Rubber is arguably the biggest threat to the continued development of the cocoa segment, according to the Pulitzer Center’s reporting; while there is relatively little price discrepancy between rubber and cocoa, the growing period for rubber is longer – 10 months versus the six for cocoa – and the plant produces more, thus creating greater earning opportunities for producers.

Côte d’Ivoire is also a major cashew nut exporter. The country produces around 400,000 tonnes of cashews per year, exporting them mostly in an unprocessed state. However, the Regulatory Authority for Cotton and Cashew Nuts is working to change this by lobbying for the creation of greater processing infrastructure, with the end goal of processing around half total production.

While it may be desirable for agricultural producers to play a greater role in designing the reform framework moving forward, at least for the moment, Côte d’Ivoire’s work to boost local production in some crops and maintain price stability in others is a step in the right direction.

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